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4 octobre 2008 6 04 /10 /octobre /2008 10:28

BABY BOY FRANKIE (1961-BLAST OF SILENCE)
 Réal.: Allen Baron , Scé.: Allen Baron, Mel Davenport , Ph.: Merrill S Brody , Mus.: Meyer Kupferman , Dean Sheldon , Prod.: Magla Productions , Dist.: Ciné Classic , Durée: 77 mn 
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vec: Allen Baron , Molly McCarthy , Larry Tucker , Peter Clame , Danny Mechan    

Les amateurs de film noir le savent bien . Le destin est une putain , capable de vous faire atteindre le septième ciel ou de vous laisser sur le trottoir . Comment expliquer qu'avec un tel premier film Allen Baron n'ait pas eu la chance de poursuivre sa carrière au cinéma au lieu de se mettre servilement au service de la petite lucarne ?
Un petit chef-d'œuvre qui sort enfin de l'obscurité comme son générique : une lumière au loin se rapproche. Nous sortons d'un tunnel alors qu'une voix off traînante et rocailleuse décrit la naissance de Frankie Bono , sa trajectoire vers la haine et la violence . Bienvenue à Manhattan , ses lumières et décorations de Noël, ses quartiers mouvants , sa population mobile où déambule notre tueur à gages avec comme seul compagnon sa solitude . Amateurs d'enquête policière , d'intrigue à rebondissements passez votre chemin . La voix off omniprésente et dérangeante de Lionel Stander (le fidèle Max de la série l'amour du risque) nous dresse le portrait complet de ce tueur professionnel . Son enfance et ses traumatismes , ses pensées et ses doutes , ses croyances et ses illusions dans une rédemption par l'amour .
Sa personnalité jusque dans sa psyché nous est dévoilée . Le spectateur se retrouve comme lui , mal dans sa peau et perturbé dans sa tête . Seul , effroyablement seul . Comme lui , il marche de long en large dans les rues de cette ville qui n'est jamais aussi belle que lorsqu'elle est photographiée en noir et blanc . Il suit sa future victime , un petit caïd d'une mafia de quartier . Il apprend à le haïr et connaître ses habitudes pour mieux le tuer au moment propice . Pour exécuter son contrat , qu'il sait être le dernier , il doit se procurer un calibre 38 et son silencieux .
Voilà le plus gros de l'intrigue réalisée sans moyen , combinant intelligemment l'imagerie des films noirs des années 40/50, sa mise en scène classique et un style réaliste et naturel très Nouvelle Vague . Quelque part entre Jean Pierre Melville et John Cassavetes . Une puissance visuelle admirée par Martin Scorsese .
D'ailleurs , Allen Baron qui interprète lui-même Frankie Bono a des allures avant la lettre de Robert De Niro dans TAXI DRIVER . La similitude du regard des deux cinéastes est frappante . Fortes sont les images comme ce long plan fixe d'une silhouette à l'horizon qui s'avance vers nous . Celle de l'âme d'un tueur qui hante une ville encore endormie après s'être occupé du trop gourmand Big Ralph . Ou encore cette même silhouette paumée sur le toit d'un immeuble qui guette sa proie tel un ange du mal qui se prend pour Dieu , ayant droit de vie et de mort sur les hommes . Frankie Bono de Cleveland est un psychopathe qui s'ignore . Solitaire qui assassine sans état d'âme et simple quidam qui souffre de solitude . La musique Jazz incessante et ce chanteur qui martèle son conga résonne dans sa tête , l'entraînant vers sa fin inexorable dans un petit village de pêcheurs d'une puissance visuelle elle aussi troublante . (Existe en DVD) 
  

 

 

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26 septembre 2008 5 26 /09 /septembre /2008 17:11

LA VIE FACILE (1949-EASY LIVING) Réal.: Jacques Tourneur , Scé.: Charles Schnee , Ph.: Harry J. Wild , Mus.: Roy Webb , Prod.: Robert Sparks , Dist.: RKO , Durée: 77 mn   

Avec: Victor Mature , Lucille Ball , Lizabeth Scott , Lloyd Nolan , Paul Stewart , Sonny Tufts , Don Beddoe                           

La RKO n'est pas très riche mais elle a un coeur en or pour Jacques tourneur qui fait l'économie de moyens pour un maximum de frayeurs . La peur est hors champ . L'esprit du mal bien présent . On croit l'avoir vu mais non c'est l'art de la suggestion de Tourneur qui nous joue de mauvais tour dans LA FELINE , VAUDOU , L'HOMME LEOPARD . Avec ses premiers RENDEZ-VOUS AVEC LA PEUR , son cinéma se met en place . Un savoir-faire où les visages et les décors sont éclairés pour mieux nous jeter dans le doute de l'obscurité . Tourneur sans cesse nous surprend . Avec lui , les hommes sont des fantômes , des mystères jamais élucidés . Son regard sur le monde est d'une lucidité extrême qui ne peut se résoudre à la réalité . Comment combattre l'invisible ? Faisons de lui un ami ! Notre inconscient un allié , nos intuitions des vérités . Sa démarche est unique . Par exemple , dans WICHITA , un duel menaçant est avorté par une poignée de mains tandis qu'une balle perdue peut terrasser un enfant . Le souffle de l'invisible qui revêt souvent l'habit du Fatum est accompagnée d'un sens pictural et pittoresque de l'image .
Dans un univers étrangé à Tourneur (celui du sport) , LA VIE FACILE est un mélo où les personnages sont aveugles et avancent dans la société comme des zombies qui ont soif de réussite sociale . Les hommes sont emprisonnés le plus souvent par des ombres de grilles , stores , volets , barreaux en tout genre , d'une force symbolique dont on ne peut s'échapper . Les rapports humains pervertis par l'argent sont d'une grande cruauté et l'âme la plus belle , celle de Anne (Lucille Ball) est obligée de se cacher sous un cynisme mélancolique .
Les relations amoureuses sont difficiles et tourmentées . Le romantisme n'a pas sa place ici , juste dans une chanson lors d'une soirée tandis qu'un couple s'entre-déchire , contraste saisissant pour une ambiance d'amertume .
 Pete Wilson (Victor Mature) , le roi du football américain est au sommet de sa gloire . Sa femme (Lizabeth Scott) l'aime pour son argent , tremplin pour sa propre ascension sociale et le trompe avec un riche pervers . Atteint d'une maladie de cœur (au propre comme au figuré) , il perd l'équilibre et chute victime de la société capitaliste qui fonde la richesse sur le modèle du bonheur . Envoûté lui aussi par le système il ne peut se résoudre à dévoiler sa maladie à sa femme arriviste . Qu'importe le talent , le gagnant est celui qui ramène le plus d'argent . Son employeur , les médias sont de connivences , il est devenu un billet de banque! Même à l'intérieur de l'équipe , ça pue l'individualisme malsain , les coéquipiers de Victor Mature en déclin lui offrant des béquilles . A part Anne et son meilleur ami , tous lui tournent le dos car il est devenu à leurs yeux un loser . Tourneur nous surprend de nouveau avec cette féroce et subtile charge sociale auquel il insuffle sa vision très noire . Pete Wilson ayant à plusieurs reprises l'intuition de sa chute annoncée et le photographe qui rôde tel un oiseau de mauvaise augure prêt à plonger sur sa proie à la moindre défaillance , sont typiquement Tourneurien .
Un film de commande trop longtemps ignorée , par son réalisateur lui-même , qui gagne à être connu pour son scénario écrit au scalpel par Charles Schnee, l'auteur des ENSORCELES de Vincente Minnelli , sa photographie soignée et sa mise en scène subtile et tragique signée Jacques Tourneur . (existe en DVD) 
 

 

 

 

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20 septembre 2008 6 20 /09 /septembre /2008 17:47

HANGOVER SQUARE(1945)
Réal.: John Brahm , Scé.et adapt: Barre Lyndon , D'après le roman de Patrick Hamilton , Ph.: Joseph La Shelle , Mus.: Bernard Hermann , Prod et Dist.: 20th Century-Fox , Durée: 78 mn  

Avec: Laird Cregar , Linda Darnell , George Sanders , Glenn Langan , Faye Marlowe , Alan Napier  

L'un des fleurons jamais assez vanté du film de studio où John Brahm peut maîtriser tous les paramètres de sa mise en scène . Déjà il avait excellé avec ce qui est la meilleure adaptation de JACK L'EVENTREUR . A peine a-t-il quitté cette atmosphère lugubre de l'époque Victorienne , qu'il enchaîne avec la même équipe pour nous replonger dans son style chère à l'expressionnisme allemand.Il nous immerge avec délectation dans cette histoire de Patrick Hamilton , déjà à l'origine du très célèbre HANTISE de Georges Cukor . Laird Cregar est toujours aussi ambigu et tourmenté . Peter Lorre avait son M LE MAUDIT , Laird Cregar a son HANGOVER SQUARE avec sa stature imposante , sa voix douce , ses gestes fébriles , sa violence impulsive , son regard qui panique . Sa disparition avant la sortie du film causée par une succession de régimes trop stricts le rapproche non sans dérision de Georges Bone , un homme passionné en lutte contre lui-même où l'acteur rejoint le personnage qu'il interprète .
George Bone est un compositeur de talent souffrant d'amnésie . A chaque sortie de crises causées par une contrariété et un bruit discordant , il ne se souvient plus de ... ses crimes . D'un homme raffiné , il se transforme en bête sauvage sans en avoir conscience . On reconnaît là une variante du Docteur Jekill et Mr Hyde entre film noir et fantastique . En contactant le docteur Middleton (George Sanders) de Scotland Yard il cherche les preuves pour se disculper ou se condamner . C'est un innocent aux mains sales! Et lorsque le docteur lui explique qu'il peut guérir ses amnésies en abandonnant sa musique pour éviter le surmenage , on sait qu'il est perdu car on ne peut échapper à ce que l'on est .
Le concerto macabre peut commencer , composé par Bernard Herrmann il impose un tempo de génie à la caméra de Brahm qui met en lumière les zones les plus sombres de notre personnage tourmenté . Dès que la musique retentit lors du concert final , la caméra se met en mouvement pour clore en apothéose une virtuosité technique irréprochable . Elle nous rappelle qu'Hitchcock n'est pas le seul à faire naître le suspense sur la musique de celui qui deviendra son collaborateur attitré .
La photographie resplendissante d'HANGOVER SQUARE signée par Joseph La Shelle nous sort de l'ombre pour en dessiner d'autres sur les décors et costumes . Elle achève de donner au film ce raffinement , cette noirceur , cette fascination vénéneuse et morbide qui contamine le spectateur . (Actuellement sur CineCinemaClassic dans une copie qui rend hommage au travail du chef-opérateur malgré quelques points blancs et rares griffures .Une copie qui ne demande qu'à être restauré .)
 

 

 

 

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15 septembre 2008 1 15 /09 /septembre /2008 10:19

TUEZ CHARLEY VARRICK (1973-CHARLEY VARRICK)
Réal.: Don Siegel , Scé.: Howard Rodman , Dean Riesener , D'après le roman « Les pillards » de John Reese , Ph.: Michael Butler (Technicolor) , Mus.: Lalo Schifrin , Prod.: Jennings Lang , Dist.: Universal International Corporation ,  112 mn 
Avec: Walter Matthau , Joe Don Baker , Felicia Farr , Andy Robinson , John Vernon , Jacqueline Scott    

L'homme n'a pas attendu le cinéma pour raconter des histoires . Vous pensez bien qu'elles ont déjà toutes été inventées . Une même histoire , si tant est qu'elle soit bonne , peut se décliner à l'infini suivant la personne qui la raconte . Alors si vous avez aimé NO COUNTRY FOR OLD MEN des frères Coen , vous aimerez TUEZ CHARLEY VARRICK de Don Siegel . Surprenant de citer ce récent succès critique et public pour vanter les mérites d'une pépite de 1973 . Cela est dû certainement à la personnalité et aux styles différents de ces hommes qui font de bons films .
 Les frères Coen jouissent du prestige d'être considérés comme des auteurs dans un cinéma de genre réhabilité .
Don Siegel , plus humble , se voyait comme un artisan du 7ème Art . Il est resté longtemps un simple habile réalisateur de film de genre avant d'être considéré aujourd'hui comme une référence . Clint Eastwood lui doit beaucoup . Son cinéma aussi sobre qu'efficace a produit des petites merveilles . Son A BOUT PORTANT , remake des TUEURS de Siodmak est un chef-d'œuvre pour un autre chef-d'œuvre . L'expéditif INSPECTEUR HARRY c'est lui aussi .
Dans tous les domaines TUEZ CHARLEY VARRICK cache bien son jeu . Vous perdez , ici , l'atmosphère glauque , poisseuse de l'univers des frères Coen mais vous y gagnez en efficacité . Dans le rôle du gars qui se retrouve avec les biftons de la mafia sur les bras , Walter Matthau tombe le masque , cesse de faire le pitre et livre une performance toute en nuance et sensibilité retenue . Surtout , il se montre beaucoup plus malin que Josh brolin pour se débarrasser du tueur impitoyable de la mafia . Dans le rôle de ce dernier , l'interprétation de Joe Don Baker fait le poids et ne souffre aucunement de la comparaison avec celle démesurée et impressionnante de Javier bardem dans le Coen .
Siegel , lui , ne se prend pas au sérieux . Il ne perd pas de vue qu'il réalise des séries B et n'hésite pas à saupoudrer son film d'un humour machiste . Cela n'empêche pas une critique sociale acerbe . Tout au long de cette chasse à l'homme , il montre le chemin et dénonce une société gangrenée à tous les niveaux par la corruption et le pouvoir de l'argent . La lutte acharnée de Charley Varrick pour échapper au molosse Texan de la mafia et emporter le morceau le désigne comme un être seul , un marginal qui se bat contre le système . Il croit faire un modeste casse dans une banque d'une petite bourgade et tombe sur une « succursale de blanchiment de l'argent sale » . Il cherche un receleur . Il veut des faux papiers . Immédiatement , il est repéré . La mafia est partout même à la campagne .
TUEZ CHARLEY VARRICK se détache aussi de son homologue par son final aussi jouissif que l'autre est poussif . Point faible de NO COUNTRY FOR OLD MEN , le final tient ici ses promesses dans l'action et l'ambiguïté . Dans une dernière acrobatie Varrick se barre avec le fric mais n'existe plus pour la société . Les plus beaux Happy End sont ceux qui ne le sont pas vraiment . (Actuellement sur Cine Polar , existe en DVD avec en bonus un commentaire du film passionnant et passionné d'Alain Corneau .)  

    

 

 

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9 septembre 2008 2 09 /09 /septembre /2008 10:05

LA MEMOIRE DU TUEUR (2003-DE ZAAK ALZHEIMER)
Réal.: Erik Van Looy , Scé.: Carl Joos et Erik Van Looy , D'après le roman de Jeff Geeraerts , Ph.: Danny Sen , Mus.: Stephen Warbeck , Prod.: MMG Film , TV1 , TROS , Bridge Entertainment Group , Dist.: ARP Sélection , Durée: 123 mn   
Avec: Jan Decleir , Koen de Bouw , Werner de Smedt , Gene Bervoets , Jo de Meyere, Tom van Dyck     

Les jeunes réalisateurs frenchy nourris au cinéma de genre américain ont aujourd'hui la prétention d'égaler les grands maîtres vénérés. Malgré quelques exceptions , ils ne font que refaire ce qui a déjà été fait et les effets de style à la mode n'y changent rien . Dans de tels films il faut qu'on y croit car le cinéma de genre est bourré de clichés . Réinventer le genre en utilisant les mêmes ficelles n'est pas donné à n'importe qui . Surtout le spectateur ne doit pas ce dire : « cette scène fait penser à ... » . En un mot le film doit avoir une âme , exister par lui même . Justement , en 2003 lorsque sort LA MEMOIRE DU TUEUR sur les écrans , les belges donnent aux français une grande leçon de cinéma américain . Du Polar , du vrai . Une recette belge mise à la sauce ricaine . Qu'est ce qu'il y a de plus effrayant et traumatisant en Belgique que le psychopathe du SILENCE DES AGNEAUX ? L'affaire Dutroux bien sûr , sa pédophilie , ses réseaux de prostitutions , ses notables et politiciens impliqués . Van looy intégre habilement cette blessure de l'âme belge dans son intrigue . Basée sur une histoire du grand auteur flamand du roman policier jeff Geeraerts , personnages , caractères , relations et ambiances sont réussis . Sans aucun doute , on y croit alors que nous ne sommes plus à New York mais à Anvers . Se payant même le luxe d'introduire dans cette ambiance glauque une dose d'humour entre les deux flics et de faire des clins d'œil au genre avec la veuve éplorée et sexy , femme fatale en faillite .
Véritable film noir moderne avec ses couleurs grises , bleutées , verdâtres parcourues par des faisceaux lumineux rouges qui touchent leurs cibles . Le film fait mouche jusque dans les seconds rôles très bien intégrés à l'ensemble . Valorisée par le réalisateur , la ville d'Anvers s'impose et n'est plus un lieu improbable pour le polar . Quelques imperfections cependant car Van Looy cède parfois aux effets à la mode style SEVEN mais ce procédé de mise en scène est justifié dès qu'il traduit les symptômes d'Alzheimer du personnage principal . Les mots de sa mémoire qu'il griffonne sur son avant-bras avant qu'il ne les oublie ne sont pas sans rappeler le MEMENTO de Christopher Nolan .
La fin , quant à elle, semble s'éterniser . Le spectateur ne s'en plaindra pas tellement Jan Decleir crève l'écran . Même si les autres acteurs sont bons , sa seule présence dans une scène la rend carrément géniale . Il porte l'âge de son personnage . Son côté désabusé , touché par la maladie , au bout du rouleau le rend plus humain alors que c'est un tueur implacable .Son passé a fait de lui ce qu'il est mais sa douleur le rapproche du flic qui le traque car on ne touche pas à un enfant! Une alliance trouble unit ces deux hommes contre des ennemis encore plus troubles dans un polar sous influence , estampillé Made in Belgium . (Actuellement sur
Canal + , existe en DVD)   

 

 

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28 août 2008 4 28 /08 /août /2008 17:23

          

LE PARFUM , HISTOIRE D'UN MEURTRIER (2005)
Réal.: Tom Tykwer , Scé.: Andrew Birkin , Bernd Aichinger , Tom Tykwer, d'après le roman de Patrick Süskind , Ph.: Frank Griebe , Mus.: Tom Tykwer , Johnny Klippe , Reinhold Heil , Prod.: Bernd Eichinger , Constantin Films , Dist.: Metropolitan Film export , 147 mn 
avec: Ben Whishaw , Alan Rickman , Rachel Hurd-Wood , Dustin Hoffman , Karoline Herfurth , David Calder , Sian Thomas      
 
Qui a lu LE PARFUM de Patrick Süskind et a vu son adaptation cinématographique doit se rendre à l'évidence : à quelques différences près c'est un véritable copier-coller . A ce titre la réussite est totale . De grands noms , comme par exemple Stanley Kubrick , se sont intéressés à ce roman réputé impossible à filmer pour finalement abandonner tant la tache était rude . Tom Tykwer l'a fait pour vous avec seulement le prestige d' un petit film habile intitulé COURS LOLA COURS . Il s'en sort haut la main , sachant retranscrire parfaitement l'ambiance du roman . La débauche d'odeurs qui assaille le spectateur doit beaucoup aux décors et lumières combinés à une mise en scène maniériste .
L'esprit du livre c'est aussi celui d'un tueur en série , d'un être tourmenté qui a du nez , seul don que la nature lui a donné . Jean Baptiste Grenouille est seul au monde , enfermé dans sa quête obsessionnelle du parfum parfait qui le ferait aimer du monde entier . Sans jugement moral , le spectateur suit le parcours de ce psychopathe du 18e siècle entièrement mis à nu . Une victime , un être finalement pétrie de paradoxe , incapable d'aimer mais voulant se faire aimer, capable de tuer sans être une fin en soi mais un moyen pour satisfaire sa passion .
En somme , un livre-film sain sur un sujet malsain où l'horreur de la mort côtoie la sensualité de la vie .(A ce propos un critique du Monde a parlé d'idéologie nazie devant cette quête de la perfection et ces cadavres retrouvés nus et rasés . Notons que cette idée malsaine ne lui serait jamais venu à l'esprit si les auteurs n'étaient pas de nationalité allemande .)
Tom Tykwer fait sensation avec la luxuriance d'émotion qui parsème son film . Mais , on lui en veut terriblement de nous avoir pris par le bout du nez , de nous en avoir mis plein les narines pour au final ne plus rien sentir . A vouloir coller au récit du roman, il prend le risque de perdre son public . Il pêche par orgueil à vouloir à tout prix réaliser la scène d'orgie finale complètement casse gueule à l'écran . Il lui manque sa propre vision de l'œuvre en tant que cinéaste . Il est un peu comme Baldini (l'excellent Dustin Hoffman) un grand faussaire de génie qui connaît son travail sur le bout des ongles . Gageons qu' il devienne un jour le Jean Baptiste Grenouille du cinéma . 

 

 

 

 

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24 juillet 2008 4 24 /07 /juillet /2008 20:56

LES PROMESSES DE L'OMBRE (2007-EASTERN PROMISES)
Réal.: David Cronenberg , Scé.: Steven Knight , Ph.: Peter Suschitzky , Mus.: Howard Shore , Prod.: BBC Films , Serendipity Point Films , Focus Features , Kudos Productions Ltd , Dist.: Metropolitan FilmExport   
 Avec: Viggo Mortensen , Naomi Watts , Vincent Cassel , Armin Mueller-Stahl , Jerzy Skolimowski , Sinéad Cusack , Donald Sumpter  
Le cinéma de David Cronenberg est une lame tranchante et froide d'un scalpel qui pénètre la chair dans un mélange de douleurs et de jouissances. Il faut être maso pour aimer son cinéma . Ça tombe bien , on aime tous se faire peur dans le noir . C'est l'un des rares grands maîtres du fantastique qui tient encore la route avec David Lynch le virtuose du bizarre dans le quotidien . Dario Argento n'est plus que l'ombre de lui-même . William Friedkin semble se chercher comme un adolescent . Wes Craven se perd. Tobe Hooper n'en parlons pas . Cronenberg est dangereusement cérébral , pas du genre à livrer un produit commercial mais de l'underground dérangeant et déroutant . Il s'aventure désormais dans le polar depuis HISTORY OF VIOLENCE et la température reste toujours aussi basse . Malgré ses intrusions dans un genre différent , Il nous parle toujours avec le même langage . C'est un auteur comme David Lynch qui a son propre univers et pas un cinéaste qui film a l'esbroufe style « regardez comme je sais vous en mettre plein les yeux » sans avoir rien à dire ! C'est un cinéaste de la contamination de l'esprit et du corps . L'infection de la chair se mêle à des désirs sexuels malsains (FRISSONS et RAGE) , une tête explose par la seule force de l'esprit (SCANNERS) , des enfants monstres naissent des fruits d‘une mère au psychisme dérangée (CHROMOSOME 3) , à la vision de scènes de tortures et de sexe des hallucinations transforment un abdomen humain en magnétoscope , une main en revolver organique (VIDEODROME), à la suite d'une téléportation un corps se décompose inexorablement (LA MOUCHE) , entre chairs blessées et tôles écrasées un couple prend son pied dans les CRASH de voitures.
les frontières entre le corps et la matière , le réel et l'imaginaire , l'attirance et la répulsion deviennent floues . Cette marque de fabrique à l'ambiance de froideur clinique se retrouve dans le documenté PROMESSES DE L'OMBRE sur la mafia russe à Londres . Pas étonnant donc que la scène la plus forte et dérangeante soit celle du bain turc où Viggo Mortensen nu , fraîchement tatoué par ses « pères » doit affronter deux redoutables tchétchènes . Fascinante scène de violence crue qui nous dégoûte par sa bestialité et sa chorégraphie trop réelle . Dans cette univers souillé se jette une sage-femme (Naomi Watts) à la fois terrorisée et séduite par Viggo Mortensen . Deux mondes , deux familles incompatibles qui par un retournement de situation dans le scénario rend les différences encore plus ambiguës .
Filmée comme jamais auparavant , Londres , son architecture jusqu'à son climat est assujettie entièrement à la subjectivité de Cronenberg . Réalité d'une ville plongée dans la fantasmagorie de notre troublant réalisateur . Dopés par un casting international mais pas évident , les membres de cette mafia russe sont terrifiants de crédibilité, ce qui renforce le contraste entre l'aspect documentaire réaliste et le climat malsain proche du fantastique . De toute évidence Cronenberg est un auteur qui tient encore ses promesses . 

 

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13 juillet 2008 7 13 /07 /juillet /2008 20:07

LA NUIT NOUS APPARTIENT (2007-WE OWN THE NIGHT)
Réal.: James Gray , Scé.: James Gray , Ph.: Joaquin Baca-Asay , Mus.: Wojciech Kilar , Prod.: Mark Wahlberg et Joaquin Phoenix  , Dist.: Wild Bunch Distribution , Durée 1H53 
Avec : Joaquin Phoenix , Mark Wahlberg , Robert Duvall , Eva Mendes , Alex Veadov , Tony Musante
               

Fichtre! Qu'il est bon Joaquin Phoenix( Bobby Green) dans LA NUIT NOUS APPARTIENT , c'est Al Pacino dans LE PARRAIN . Vous savez la scène où il prend une arme dissimulée dans la cuvette des chiottes et qu'il retourne s'asseoir dans le resto face au chef de la police et au mafieux . Il est là , il les écoute et son regard en dit long sur ce qu'il ressent : sa haine , son mépris , son désir de vengeance , sa détermination , sa peur aussi . Tous ses sentiments qui passent à travers son regard avant qu'il les exécute. Et bien Joaquin Phœnix a le même lorsque Vadim le responsable de l'agression de son frère vient s'asseoir à sa table pour lui proposer de participer à son trafic de drogue . Lui aussi devra faire un choix dans ce PARRAIN à l'envers . La famille n'est pas la même , ici nous sommes du côté des flics . Mais ni la police , ni la mafia russe n'intéresse James Gray . Depuis LITTLE ODESSA et THE YARDS , ce réalisateur se passionne pour les déchirements des liens du sang à l'intérieur du film noir . Il n'y a que les grandes courges du jardin Cannois pour n'avoir rien compris et sifflet un film jugé trop moralisateur et caricatural entre le bien et le mal . Qu'est ce qu'on lui reproche à James Gray au juste , d'avoir l'art et la manière pour nous plonger dans les ténèbres de cette tragédie familiale ?
Un film beau comme un diamant noir qui parle de rédemption avec l'accent de la fatalité . Dans la scène du laboratoire clandestin et sur la totalité de cette belle ouvrage , il est passionnant de voir un réalisateur prendre le pouls de son acteur fétiche . Il le déprime , le plonge dans les ténèbres , le drogue et le fait flipper à mort . Tout palpite en lui , des paupières jusqu'au cœur . Il se sent étouffer comme quelqu'un qui se noie sans pouvoir se raccrocher au bord de la piscine . Lesté d'un poids mort (son irrésistible ascension aux enfers) , il coule alors qu'il voudrait être léger comme une « plume » . Il lui faut changer de religion . Sa boite branchée de Brooklyn n'est pas la bonne église pour lui . C'est au bal de la police que vont danser les siens . Et comme son frère (Mark Wahlberg) , son père (Robert Duvall) , il aura gravé sur son dos les initiales N.Y.P.D. Les liens du sang sont les plus forts et c'est à sa famille qu'il se raccroche . Les sentiments de ces trois là se télescopent , les mauvais se nouent et se dénouent , les bons se croisent et se décroisent car dans ressentiment il y a toujours sentiment ! Dorénavant, Bobby voit clair mais la vie a la couleur du noir , l'odeur de la peur . Un déluge tombe sur lui après une mémorable poursuite en voiture digne d'un William Friedkin de la meilleure époque . Il lui faut traverser la fumée blanche de la coke et des fumigènes pour retrouver l'héritage de son sang après avoir versé celui de Vadim . La tête de la Mafia Russe tombe avec à son cou une étoile de David et une croix Chrétienne . Une famille soudée au nom du Dieu Dollar . Sa prière est exaucée mais Bobby cherche du regard sa sublime portoricaine (Eva Mendes) loin de cet autre enfer où il est descendu. La nuit vous possède , vous happe et vous broie . Méfiez-vous d'elle! Elle n'a jamais été aussi sexy. Jamais , elle ne pourra vous appartenir .
( pour couper le sifflet définitivement à tous les détracteurs de ce film , il faut le comparer à AU BOUT DE LA NUIT de David Ayer , une véritable bouse qui prétend s'inspirer de James Ellroy avec un Keanu Reeves en flic aux yeux plein de m..., qui est le seul à ne pas s'apercevoir qu'il est manipulé par son lourdaud de supérieur . Comme quoi , il ne suffit pas de traiter de la corruption chez les flics , d'avoir un personnage alcoolique et violent pour se faire passer pour un film noir! Le méprisable et caricatural « politiquement correct » ne se trouve pas toujours là où on le croit !)
  

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12 juillet 2008 6 12 /07 /juillet /2008 13:27

LA BRIGADE HEROIQUE (1954-SASKATCHEWAN)
Réal.: Raoul Walsh , Scé.: Gil Doud ,  Ph.: John Seitz , Mus.: Joseph E Gershenson , Prod..: Universal , Durée : 87 mn
avec : Alan Ladd , Shelley Winters , Robert Douglas , Hugh O'Brian , John Carroll Naish
 
Une envie d'air pur , de grands espaces , de forêts généreuses , de sommets enneigés , de lacs immenses aux eaux limpides , de cascades puissantes et torrents fuyants ? Alors suivez le chemin du fort Walsh (du nom du réalisateur) pour prendre la direction de l'aventure . Un poème simple , ode à la nature comme la comptine « A la claire fontaine » qui retentit parfois à la place du clairon de la cavalerie . Au Canada les tuniques ne sont pas bleues mais rouges . Justement les sioux voient rouges et pénètrent la frontière avec la réputation de leur sanglante victoire contre Custer . La police montée en déroute à cause de son officier buté est poursuivie par les ... peaux-rouges . Mais le sergent O'Rourke (Alan Ladd) s'insurge , ses hommes avec lui , contre son supérieur . Ils fuient le danger mais s'ils arrivent au fort sains et saufs c'est la corde qui les attend .
Dans ces décors naturels grandioses ils ressemblent à des fourmis rouges qui s'agitent . Qu'importe s'il n'y a aucune issue , aucun refuge , ce qui compte c'est le souffle de l'aventure , traverser aux galops ces paysages majestueux ou glisser sur l'eau dans des pirogues volées à l'ennemi . Grace Markey (Shelley Winters) qui rejoint ce groupe et qui est accusée de meurtre partage ce sentiment . C'est une femme sans avenir mais libre qui assume ses choix , qui ne reste jamais longtemps au même endroit . Même si ce western est considéré comme mineur dans la carrière de Raoul Walsh , il est indéniable qu'il possède la marque de fabrique de notre auteur préféré : sens du rythme et de l‘espace, importance de l'action , de l'amitié et de la fraternité entre les peuples . Un cinéma qui regarde les hommes droit dans les yeux sans pontifier .
Sans hésiter , à la piété grandiloquente d'un Cecil B De mille on préfère la spontanéité et l'humanisme débonnaire d'un Raoul Walsh même mineur . LES TUNIQUES ECARLATES du premier paraissent bien fade face à cette BRIGADE HEROÏQUE souvent passé sous silence par Walsh lui-même. Le DVD qui vient de sortir rend hommage à la beauté des paysages canadiens dans une image aux couleurs resplendissantes . Une aventure à vivre , on ne le criera jamais assez !  

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27 juin 2008 5 27 /06 /juin /2008 11:49

L'ENFER EST A LUI (1949-WHITE HEAT)
Réal.: Raoul Walsh , Scé.: Ivan Goff , Ben Roberts , D'après une histoire de Virginia Kellogg , Ph.: Sid Hickox , Déc.: Edward Carere , Mus.: Max Steiner , Prod.: Louis F. EDELMAN/Warner Bros , Durée: 114 mn 
avec : James Cagney , Virginia Mayo , Edmond O'Brien , Margaret Wycherly , Steve Cochran , John Archer , Wally Cassell , Mickey Knox , Paul Guilfoyle , Ian Mac Donald , Fred Clark
 , Ford Rainey         
Ce n'est pas dans la petite cervelle de ce gros bêta de Léo , le lion propre sur lui de la MGM avec ses rugissements à effrayer une pucelle , que germe L'ENFER EST A LUI . A la MGM , acteurs et réalisateurs sont domptés depuis longtemps . Ils vivent dans une cage dorée et réalisent des comédies musicales , des oeuvres historiques et des biographies d'hommes célèbres très coûteuses . Face à cette effervescence académique et à ce conservatisme de la luxuriance , la Warner apparaît bien plus sauvage et n'hésite pas à aborder des sujets sociaux plus réalistes . A la Warner , on aime les gangsters dans les films noirs . Ici , le héros ce n'est pas Edmond O'Brien qui joue le rôle fade du flic infiltré mais James Cagney ce cinglé de Cody Jarrett . Un acteur-fauve redoutable , impossible à mettre en cage . Le genre d'animal qu'il ne faut pas regarder dans les yeux , qui souffre d'une dégénérescence héréditaire et dont il faut se méfier . Une fêlure au cerveau lui donne des migraines et des maux de tête terribles à cause sans doute d'un gêne venu tout droit de l'asile de fou où a fini son père . Il voue un amour compulsif à sa mère complice , seule véritable équilibre dans sa vie faite de braquages et de cavales . Dans sa bande tout le monde le craint même Verna (Virginia Mayo) sa femme complote contre lui . Mais "Ma" veille au grain...Vous riez ? Vous vous moquez du fils à sa maman ! Alors vous finirez dans un coffre de voiture , cribblé de balles .
L'interprétation épileptique de James Cagney prend toute sa dimension démesurée lors de la fameuse scène où son personnage apprend la mort de "Ma" dans la cantine de la prison . L'information remonte jusqu'à lui de prisonnier à prisonnier tel un "téléphone arabe" qui sourdre progressivement la folie qui va s'emparer de lui . De sa gorge sort alors des pleures de petit enfant combiné à des rugissements féroces de fauve touché par la rage .
Pour maîtriser un tel acteur qui joue autant avec le feu , il faut un réalisateur , un vrai . Un instinctif , un anticonformiste qui n'a pas peur de se brûler . Raoul Walsh a la trempe nécessaire et sa mise en scène convulsive est faite de plans qui jaillissent  comme des pulsions . La cadence frénétique qui s'impose place le film au sommet du genre . Un film charnière , une passerelle entre les gangsters classiques des années 30 , 40 jusqu'à ceux plus modernes dans la violence de A . Mann , Fuller jusqu'à Scorsese . D'ailleurs le personnage déjanté de Joe Pesci dans LES AFFRANCHIES fait un peu penser à Cody Jarrett . Je dis bien :"un peu" car seul James Cagney est "top of the world" .  

    
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