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1 mars 2010 1 01 /03 /mars /2010 20:03

ESTHER (2009-ORPHAN)

Réal: Jaume Collet-Serra, Scé.: David Johnson, d’après une histoire d’Alex Mace, Ph.: Jeff Cutter, Mus.: John Ottman, Prod.: Leonardo di Caprio, Joel Siver, Dist.: Warner Bros, Durée: 2h03

Avec: Vera Farmiga, Peter Sarsgaard, Isabelle Fuhrman, C.C.H Pounder, Jimmy Bennett, Margo Martindale, Karel Roden.

esther-16330-794335430.jpgAlors qu’AVATAR de Cameron est encore dans toutes les bouches, ESTHER n’a pas manqué d’arriver jusqu’à nos oreilles. Ce petit thriller horrifique rudement bien ficelé continue le sillon déjà tracé par Alejandro Amenábar. Ce passionné madrilène de cinéma de genre entraîne avec lui d’autres brillants cinéastes comme Jaume Balageró (LA SECTE SANS NOM), Juan Antonio Bayona (L’ORPHELINAT) et ici Jaume Collet-Serra. Dans ce domaine les espagnols cartonnent et les ricains ne s’y trompent pas pour faire des remakes de leurs films ou faire appel à eux pour réaliser des productions US. Cette vague de séries B dévaste tout sur son passage de l’autre côté des Pyrénées pour en faire presque oublier le génial Pedro Almodovar et sa «movida» madrilène.

Collet-Serra met tout en œuvre pour nous faire sursauter, il connaît les ficelles qu’il faut tirer au bon moment pour réussir à nous impressionner. Sa direction d’acteurs est irréprochable et tous sont impeccables: le père aveugle de ce qui se passe réellement et qui doute de sa femme, la mère fragile et combative, le fils aîné sceptique et dubitatif, la benjamine sourde muette terrorisée d’effroi de ne pouvoir dire ce qu’elle sait, la psychiatre à côté de la plaque, la mère supérieure sans instinct de l’orphelinat. Tous sont manipulés par l’enfant monstre qu’est ESTHER: jeune et géniale Isabelle Fuhrman qui vous fera passer l’envie d’adopter un enfant.

Collet-Serra prend son temps pour tendre ses ficelles sans jamais les rompre et insuffle une tension sourde et hallucinante. Comme dans ce genre de production, les lieux où se déroule l'action participent activement au suspense mise en place: l’orphelinat baigné de lumière, la maison luxueuse d’architecte , le bois et la cabane dans l’arbre, le lac gelé menaçant, le terrain de jeu avec ses balançoires et son toboggan sont les témoins de ce que personne n’arrive à comprendre à temps. Avec pour augmenter ce sentiment de claustrophobie cette neige « à la SHINING » qui ne cesse de tomber.

Mais la réussite du film tient surtout dans sa révélation finale qui nous plonge la tête dans l’eau glaciale. Les plus sceptiques des spectateurs qui s’attendent à ce que le château de cartes bien monté s’écroule vers la fin seront frustrés. L’édifice solide érigé par la mise en scène prend tout son sens avec ce dénouement machiavélique.

Le spectateur qui se croit plus malin que les personnages, lui aussi, ne la pas vu venir!

 

 

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16 septembre 2009 3 16 /09 /septembre /2009 16:16

LE FLEUVE SAUVAGE (1960-WILD RIVER)

Réal.: Elia Kazan , Scé.: Paul Osborne , William Bradford Huie , Borden Deal , Ph.: Ellsworth Fredericks , Mus.: Kenyon Hopkins , Dist.: 20th Century-Fox , Durée: 109 mn , Coul

Avec: Montgomery Clift , Lee Remick , Jo Van Fleet , Albert Salmi , Jay C Flippen , James Westerfield , Barbara Loden , Franck Overton .

Dans les années 30 , durant le New Deal de Roosevelt , Chuck Glover (Montgomery Clift) a pour mission de déloger Ella Garth (Jo Van Fleet) , une vieille dame propriétaire de son île avant le lâcher des eaux du nouveau barrage en aval du fleuve Tennessee . Il faut dompter le fleuve sauvage souvent meurtrier lors de ses crues successives au nom de la protection des citoyens , de la civilisation , du progrès. Elia Kazan encre son histoire dans une réalité historique imparable pour s’intéresser de plus près aux hommes . On le sent partager entre cette politique moderne et la réponse d’Ella Garth qui parle respect de la nature , attachement à sa terre et dignité humaine . La métaphore du chien qui n’est pas à vendre qu’elle adresse indirectement à son adversaire alors qu’il n’a pas encore ouvert la bouche est irréfutable . On sent Chuk Glover un peu trop humain pour cette mission , c’est justement par l’écoute et la délicatesse qu’il pourra réussir là où son prédécesseur a échoué .

Mais lorsque Carol (Lee Remick) , la fille d’Ella décide de prendre le bac avec lui pour gagner l’autre rive , le film se laisse dériver doucement par le courant du fleuve au son des chants d’un cantique Sudiste . Elle lui raconte son passé , lui montre sa maison laissée à l’abandon . La nuit commence à tomber . Elle lui demande de rester . Dans la brume matinale , les deux amants improbables se quittent . Elle, reprenant le bac pour retrouver son île , lui s’éloignant en voiture: deux êtres qui partent dans une dérive des sentiments .

Sans aucun doute , le réalisateur est amoureux de cette contrée et c’est un amour en cinémascope aux couleurs automnales qu’il filme comme on écrit un poème réaliste et lyrique à la fois . La lumière ocre et la pluie qui tombe puis qui cesse au rythme des sentiments , l’hésitation de Chuck emportée finalement par la force passionnée de Carol (Lee Remick magistrale dans un superbe portrait de femme forte et fragile).

Une mise en scène harmonieuse mêle ainsi ces deux courants : le film à thèse socio-économique où tous les points de vue sont pris en considération et le mèlo flamboyant où les passions embrasent les cœurs les plus solitaires .

Cette démarche résolument adulte et responsable est à l’image de ces personnages qui sont à l’écoute de l’autre et abordent des thèmes riches et nombreux comme le poids du passé , la filiation , le déracinement , le racisme et bien d’autres encore .

Ce sentiment d’ouverture d’esprit domine tout le film et n’est pas à prendre comme une faiblesse . Le chantage et la violence des racistes Sudistes sont dédramatisés et paraissent totalement stériles . Les deux amants jetés à terre , dans la boue se redressent avec des sentiments décuplés .

WILD RIVER possède cette passion dévastatrice et ce désir sexuel qui inondent et brûlent les amants que l’on trouve dans les plus beaux mélos .

A ranger dans votre dvdthèque devant les meilleurs Douglas Sirk .

(Actuellement sur TCM , existe en DVD dans une très belle copie paraît-il .)

 

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14 août 2009 5 14 /08 /août /2009 20:39

STEAMBOAT ROUND THE BEND (1935)

Réal.: John Ford , Scé.: Dudley Nichols , Lamar Trotti , D’après l’histoire de Ben Lucien Burman , Ph.: George Schneiderman , Mus.: Samuel Kaylin , Prod.: Sol M Wurtzel-Fox Film , Durée: 90 mn .

Avec: Will Rogers , Anne Shirley , Irvin S Cobb , Eugene Pallette , John McGuire , Berton Churchill , Francis Ford

Vous croyez peut-être que la vieille malle de votre grenier ne contient que bondieuseries , tissus et objets poussiéreux . Prenez la peine de l’ouvrir et vous y découvrirez plus que cela : de l’émotion .

C’est un peu ce qui vous attend à la vision de ce John Ford méconnu . Le spectateur pense à un vieux film mineur de cet auteur et il se retrouve devant une œuvre ahurissante indémodable . Avec déjà sa marque de fabrique qui consiste à passer du drame à la comédie , du grave au léger , de l’action à l’émotion dans une mise en scène fluide d’une extrême simplicité . Non , ça ne sent pas la naphtaline , plutôt le rhum , voir même l’essence de térébenthine ! Oups !

La première scène voit un alcoolique (joué par le frère du réalisateur)promettre de ne plus boire une goutte suite au sermon d’un prédicateur se faisant appelé le nouveau Moïse .

La scène suivante voit notre alcoolique repenti se convertir à une boisson médicinale à base d’alcool qui ne guérit que des bonnes intentions .

Le ton du film est donné .

La gravité est désamorcé par une légèreté des plus désopilantes . L’histoire de cet oncle naviguant sur le Mississippi sur son bateau à vapeur , voulant sauver son neveu de la pendaison et venant en aide à sa fiancée est gravement sentimentale et hilarante. Lorsqu’il persuade son neveu d’aller se livrer en pleine nuit, celui-ci se trouve contraint de s’enfermer lui-même dans la prison pour ne pas interrompre la nuit du shérif . Les personnages historiques en cire avant de finir dans la chaudière du bateau dans une des scènes les plus hystériques sont complètement désacralisés . Le mannequin représentant Grant pouvant se transformer en général Lee . La scène du mariage dans la prison avant la pendaison du marié est d’une émotion poignante tant bien même quelle désacralise nos institutions avec ce bémol tout de même puisque le fait de vouloir se marier avant son éventuelle exécution donne au mariage toute sa signification . L’humanisme de Ford se met au service d’un ton anarchisant pour en définitif défendre les valeurs de la famille . Avec lui simplicité est synonyme de subtilité .

Le seul témoin de ce meurtre en légitime défense pouvant innocenter le neveu est ce fameux nouveau Moïse que l’oncle retrouvera lors de la course désopilante des bateaux à vapeur jusqu’à Baton Rouge. Pris au lasso de la rive jusqu’au bateau , Moïse qui boit la tasse et se baptise se voit demander s’il veut un verre d’eau .

Ce récit picaresque à l’humour constant est le résultat d’une très bonne entente entre Ford et son célèbre comique Will Rogers . Les deux hommes d’origines irlandaises n’en étaient pas à leur première collaboration , DOCTOR BULL et JUDGE PRIEST annoncaient la réussite de ce STEAMBOAT ROUND THE BEND .

Et vive l’humour irlandais!

(Actuellement sur Cine CinemaClassic , existe en DVD en coffret )

 

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6 août 2009 4 06 /08 /août /2009 10:43

LE DEMON DE LA CHAIR ( 1946-THE STRANGE WOMAN)

Réal: Edgar George Ulmer , Scé.: Herb Meadows , d’après le roman de Ben Ames Williams , Ph.: Lucien Andriot , Mus.: Carmen Dragon , Dist.: United Artists , Prod.: Jack Chertok
Avec:Hedy Lamarr , George Sanders , Louis Hayward , Gene Lockhart , Hillary Brooke
Ulmer, pestiféré des grands studios qui s’en accommode très bien, préférant garder son indépendance est devenu un cinéaste culte : spécialiste de petites séries B et productions ultra fauchées pas toujours sauvées par son talent. Citons ses titres de noblesse : le polar fataliste avec DETOUR, le western des minorités avec LE BANDIT et ce DEMON DE LA CHAIR avec sa femme fatale du XIXe siècle.

Notre réalisateur maudit n’est plus ici au volant d’une 2 CV mais d’une Rolls Royces digne de son talent expressionniste. Qu’on lui donne les moyens et le résultat sur l’écran se voit !

LE DEMON DE LA CHAIR s’est le film Romantique en costumes perverti par les codes du film noir. La beauté sulfureuse d’Hedy Lamarr est tout indiquée pour traverser ces zones d’ombres. L’idée de génie est que son personnage Jenny manipule, dupe et trompe son monde en se faisant passer pour une âme charitable. En donnant beaucoup d’elle-même , elle sert ses propres intérêts. Elle séduit les hommes riches comme par maléfice et envoûtement. C’est un démon déguisé en ange.

Mais contrairement à l’affiche du film où son visage est d’un côté clair, l’autre obscur , sur la pellicule se trouve point de caricature. La frontière entre le bien et le mal est bien plus invisible en réalité. La force de la mise en scène d’Ulmer est de rendre ces clairs-obscurs complexes de l’âme humaine limpide et lumineux. A la seconde près, le spectateur comprend les plans machiavéliques qui se trament dans l’esprit habité de Jenny. Après avoir séduit le père, riche notable de la ville elle se met en tête de posséder le fils. Alors elle fait l’obscurité dans la pièce pour n’allumer qu’une simple bougie et lui « éclairer le chemin » jusqu’à sa chambre. Elle qui se faisait fouetter par son alcoolique de père gardant un sourire lubrique pendant un instant, excite le fils de son mari en lui évoquant ses relations avec les prostituées. Puis s’efface, arrivés au bout de l’escalier le laissant en suspens. Quelques scènes plus tard, de nouveau, avant de lui intimer l’ordre carrément de tuer son père, elle fait l’obscurité en éteignant seulement deux bougies sur trois du chandelier. La flamme restante renvoyant à la scène précédemment évoquée.

Elle indique le chemin aux hommes non pas pour les éclairer mais pour les laisser dans l’obscurité : les empêcher de réfléchir pour mieux profiter d’eux quitte à patauger dans la boue de sa conscience .

Certes, elle sème le mal autour d’elle mais on la sent aussi sincère. Lorsqu’elle force la main de son mari et des notables de la ville pour faire un don à l’église, elle sait qu’elle mettra tout le monde dans sa poche mais le prêche du prêtre a touché sa corde sensible : une profonde compassion pour son père victime de l’alcoolisme. Arrivée en haut de l’échelle sociale, elle reste aussi fidèle à son amie prostituée la protégeant lors de coups dures. Ayant une haute estime d’elle car jugée non hypocrite et pure.

Si Jenny est une prédatrice, c’est aussi une victime comme eux. Ses proies qui se targuent d’être l’élite de la société n’en sont pas moins pétries de névroses et de défauts accablants. Son mari est avare et manipulateur. Son beau fils faible et lâche. La fiancée évincée complètement effacée. Seul, le personnage de Georges Sanders semble voir clair mais ne peut agir à cause de son amour et de son hypocrisie.

Au retour du sermon du prédicateur, Jenny se trouve pris dans la tourmente des remords de sa conscience. De retour chez elle, elle se met à allumer les lumières comme pour effacer toutes les zones d’ombre de sa personnalité. Elle est horrifiée par sa condition humaine où la vie est assimilée à l’enfer tandis que Sanders lui répond imbue de lui-même et de son statut social que le monde qu’elle décrit est celui des morts.

Cette critique sociale sous-jacente finit de faire vaciller la flamme de ces âmes humaines fragiles et sans pitié. (existe en DVD)

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22 juin 2009 1 22 /06 /juin /2009 20:25

THE WEB (1947-LE TRAQUENARD)
Réal.: Michael Gordon , Scé.: William Bowers et Bertam Millhauser , d'après une histoire de Harry Kumitz , Ph.: Irving Glassberg , Mus.: Hans J. Salter , Dist.: Universal , Prod: Jerry Bresler
Avec: Ella Raines , Vincent Price , Edmond O'Brien , William Bendix

Les noms d'Ella Raines , Vincent Price , Edmond O'Brien , William Bendix s'inscrivent sur le générique . Il n'en faut pas plus pour attiser notre attention et nous jeter dans cette histoire comme un chercheur d'or à la recherche de la perle rare . Le film apparaît très vite comme une mécanique bien huilée et ne déçoit pas notre enthousiasme . La direction d'acteur de qualité et la mise en scène classique et soignée de Michael Gordon est un moteur qui ronronne sur la route sinueuse que lui fait suivre le scénario de William Bowers . Pas manchot du stylo , ce dernier entraîne le personnage d'Edmond O'Brien , naïf avocat dans la machiavélique toile tissé par Colby , un riche homme d'affaires joué par un Vincent Price a la hauteur de sa réputation de distingué et malin salopard . Il amène ses proies , amis d'hier , à se laisser prendre dans sa toile avec un sang froid et un jeu d'acteur digne des meilleurs manipulateurs .
Sa secrétaire , la dévouée Noel a les jolies traits de la mystérieuse Ella Raines . Son charme tranquille de ténébreuse brune est au top et opère à plein . Elle se partage entre ses deux hommes et on ne saura qu'à la fin de qui elle est réellement l'alliée . Après nous avoir fait craquer dans PHANTOM LADY en 1944 et IMPACT en 1949 , cette superbe actrice a une nouvelle fois la très grande classe des femmes les plus fatales du film noir .
Celles qui vous obsèdent et vous entraînent , soit à votre perte soit à vous surpasser .
Mais celui qui tire les ficelles est bien le scénariste à qui nous devons ici rendre hommage . Colby étant une digne métaphore des auteurs Hollywoodiens , les autres personnages n'existant qu'à travers les complots qui les accablent . Plus encore qu'un scénariste Colby est l'image même du producteur Hollywoodien influent qui possède l'argent et indique la direction fatale à suivre .

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6 juin 2009 6 06 /06 /juin /2009 09:59

LE MONDE LUI APPARTIENT (1952-THE WORLD IN HIS ARMS)
Réal: Raoul Walsh , Scé.: Borden Chase , Horace MacCoy , d'après le roman de Rex Beach , Ph.: Russel Metty , Mus.: Frank Skinner , Prod.: Aaron Rosenberg-Universal , Durée: 104 mn
Avec: Gregory Peck , Ann Blyth , Anthony Quinn , John McIntire , Carl Esmond , Andrea King
Sentez comme cela sent bon les embruns et comme l'air se gorge d'iode . Raoul Walsh est au gouvernail . Sa goélette prend le large et fonce à toute bise sans crainte de déchirer ses voiles . Des marins pêcheurs qui chassent le phoque sont à son bord . Ils sont dirigés par un pirate .Qu'importe l'enjeu , il fait la course avec son rival de toujours: le portugais , génial Anthony Quinn qui vous postillonne au visage et vous balance son haleine de rhum , de bière et de whisky . Son interprétation sel et poivre donne du piment à celle de Gregory Peck qui n'a jamais été aussi ludique .
Film d'aventure hollywoodien , cinéma populaire des années 50 qui n'a qu'un seul but : donner du plaisir à vos cœurs romantiques de grands enfants dans un dépaysement total .
Une princesse tsariste (Ann Blyth) se fait passer pour une roturière et tombe sous le charme de ce pirate téméraire qui désire acheter l‘Alaska. Elle croit s'emparer d'un navire , c'est son cœur qui chavire pour ce démocrate Américain qui hait la noblesse Russe .
A ce titre le film a longtemps été considéré comme un pamphlet anti-rouge alors qu'il est tout le contraire puisqu'il critique ouvertement la Russie Tsariste , nous apprend Bertrand Tavernier et Noël Simsolo dans l'excellent bonus du DVD sorti récemment .
Non , la critique que l'on peut faire sur ce scénario des doués Borden Chase (à qui l'on doit les meilleurs Anthony Mann) et Horace Mc Coy serait plutôt d'ordre économique et écologique car l'explication donnée sur la disparition croissante des phoques est tirée légèrement par les cheveux: les Russes étant des massacreurs assoiffés de profit alors que les ricains respectent la sélection naturelle , laissant vivre les plus jeunes spécimens .
Mais ne boudons pas ce plaisir jouissif de tous les instants que nous procure la vision de ce petit chef-d'œuvre qui bataille sur tous les fronts .
Walsh a le chic pour faire intrusion dans les soirées aristocratiques hautaines . Il envahit les lieux en y injectant ses soiffards de marin qui sentent le poisson et le rhum qui espèrent la bagarre comme un enfant attend sa sucette . Dans le monde de Walsh , les prostituées font fuir un colonel tsariste et on se défie pour savoir qui va gagner la princesse plus belle qu'une professionnelle du sexe . Ambiance assurée !
D'une scène à l'autre ou plus fort encore d'une réplique à l'autre le plus vulgaire des marins peut se comporter comme le plus attentionné des amoureux . Le spectateur bascule avec une formidable fluidité du pugilat violent à la plus douce ambiance romantique .
Il n'y a pas de place ici pour un sentimentalisme niais . Le mot d'ordre est de « l'action , beaucoup d'action , toujours plus d'action » avec pour refléter cette devise une fantastique course de goélettes toutes voiles dehors . Un course à l'image de ces marins exaltés qui prennent la vie comme un jeu et la vivent avec intensité . La plus belle course entre deux navires jamais filmée car la plus lyrique et la plus enthousiasmante .
Un chef d'œuvre donc , non pas parce qu'il est le meilleur Walsh mais parce qu'il décrit merveilleusement ce qu'est le monde selon son auteur , peuplé d'hommes rudes et fragiles vivant une aventure exaltante et s'épanouissant dans la fulgurance de l'action .

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27 mars 2009 5 27 /03 /mars /2009 14:50

L'HOMME DE LA PLAINE (1955-THE MAN FROM LARAMIE)
 Réal.: Anthony Mann , Scé.: Philip Yordan , Frank Burt , D'après le roman de Thomas T Flynn , Ph.:Charles Lang (Technicolor) , Mus.: Georges Duning , Prod.: William Goetz , Dist.: Columbia , Durée: 104 mn   

Avec: James Stewart , Arthur Kennedy , Donald Crisp , Cathy O'Donnell , Alex Nicol, Wallace Ford , Aline Mac-Mahon , Jack Elam , James Millican        

Pauvre Jimmy , les paysages du Nouveau Mexique après ceux de l'Oregon (LES AFFAMEURS), du Colorado (L'APPÂT) et du canada (JE SUIS UN AVENTURIER) sont décidément bien trop grand pour toi .Tu es bien trop humain pour ne pas souffrir dans ces décors naturels grandioses . Tes épaules pas très larges d'homme ordinaire à la volonté de fer , ton long corps mince et décharné sont filmés ici dans un format bien trop vaste pour la petite lucarne . Anthony Mann adore voire te débattre obstinément pour accomplir la tâche qui te soulagera . Dans cette histoire de vengeance , Borden Chase a laissé la place à Philip Yordan ou à un de ses « nègres » pour te faire tordre de douleur . Dans les marais salants , des cavaliers dirigés par un chien fou viennent interrompre ton paisible travail pour brûler tes chariots , massacrer tes mules après t'avoir traîné au lasso sur un feu de camp .
De nouveau en présence de ce chien fou tu le rosses sauvagement .Tu lui fais mordre la poussière mais il t'en coûte physiquement lorsque tu dois te battre aussi avec son protecteur jusqu'entre les jambes d'un cheval , au milieu des bovins . Les bagarres à mains nues chez Mann sont toujours d'une sauvagerie absolue . La plus terrible et la plus longue étant celle du crépusculaire L'HOMME DE L'OUEST . Cette violence sèche empreinte de sadisme trouve son point culminant avec la fameuse scène où Jimmy ceinturé par ses bourreaux se fait tirer à bout portant sur la main droite . Cris de douleur et visage grimaçant , humilié , de dos et sans défense on le porte sur son cheval . A croire que tu aimes çà Jimmy d'accepter d'être traîner dans la poussière par ton réalisateur pour mieux te relever . Bafoué , maltraité , tu es déterminé à rendre coup pour coup avec sur ton visage une expression de rage d'animal blessé . Une fraction de seconde et l'on te sent capable de tomber de l'autre côté et commettre l'irréparable .
Pourtant tu es un homme simple Jimmy . Tu viens de Laramie mais tu ne te sens pas comme un étranger . Tu as souvent le sentiment d'appartenir à l'endroit où tu te trouves . Tu fais la cour d'une façon directe et naïve à Cahty O'Donnell . Ton amitié avec Wallace Ford même si elle est plus anecdotique qu'avec Walter Brennan dans JE SUIS UN AVENTURIER , est vrai et attachante . Déjà dans LES AFFAMEURS , tu t'es confronté à l'ambigu Arthur Kennedy : un méchant à l'allure déstabilisante , aux circonstances atténuantes flagrantes face à ce père adoptif (Donald Crisp) qui spécule avec les sentiments tel un ROI LEAR du western . Trafiquants d'armes et apaches ne sont qu'un prétexte pour voir ces personnages se déchirer dans des scènes fulgurantes de tension et en cinémascope s'il vous plait ! Dans ces décors naturels beaux et inhospitaliers , tu restes Jimmy un homme bon .
 Mais dans mon enthousiasme je te confonds avec Will Lockhart , le personnage que tu interprètes , ou est-ce le Lin McAdam de WINCHESTER 73 , le Glyn McLyntock des AFFAMEURS , le Howard Kemp de L'APPÂT ou le Jeff Webster de JE SUIS UN AVENTURIER ?  

 

 
 
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14 mars 2009 6 14 /03 /mars /2009 11:01

L'HOMME SAUVAGE (1969-THE STALKING MOON) Réal.: Robert Mulligan , Scé.: Alvin Sargent , Adapt.: Wendell Mayes , D'Après le roman de Theodore V Olsen , Ph.: Charles Lang , Mus.: Fred Karlin , Prod.: Alan J Pakula , Dist.: Prodis , Durée: 109 mn
 Avec : Gregory Peck , Eva Marie Saint , Robert Forster , Frank Silvera , Noland Clay

Nous sommes en 1968 , la sauce italienne est savoureuse et le western s'est transformé en spaghetti avec son meilleur plat à venir : IL ETAIT UNE FOIS DANS L'OUEST . Mais le western classique , notre préféré , est encore capable de quelques fulgurances . Robert Mulligan y fait son unique et remarquée incursion . Dans sa mise en scène tranquille qui prend son temps , il injecte un éclair , un chef apache sans pitié , un guerrier redoutable . Insaisissable , plus rapide qu'un cheval , plus fort et effrayant qu'un ours , sa ruse est démoniaque . Il veut récupérer son fils métis et son arrivée est annoncée . Il vient terroriser les spectateurs conformistes que nous sommes , peu habitués au mélange des genres . Tel un fantôme jamais on ne le voit vraiment . Au mieux on le devine , au pire il nous surprend . Il laisse derrière lui sang et cadavres et les témoins qui découvrent ses massacres soulignent toujours qu'il est seul . Tel un démon, sa combativité surnaturelle semble venir d'une force maléfique . La débâcle et la résignation de sa tribu étant proportionnelle à sa férocité .
Alors , avec l'éclaireur expérimenté que joue Gregory Peck , on est contraint de scruter l'horizon . Derrière un rocher peut se cacher notre assaillant . Derrière un arbuste peut se trouver un piège. Une balle , une flèche peut à tout moment nous stopper net . Même reclus dans un modeste ranch , il peut venir nous ôter la vie pendant notre sommeil . Un suspense paralysant est mis en place . Aux lenteurs des scènes du quotidien et des scènes d'attente répondent les jaillissements de ce corps invisible venu d'ailleurs . La violence qui se laisse entrevoir par éclairs est d'une redoutable efficacité .
Cette lutte à mort quasi fantastique se déroule dans le cadre très réaliste des extérieurs du Nouveau Mexique , western oblige . Une nature où il faut survivre face aux éléments qui se déchaînent comme cette violente tempête de sable . Une nature hostile , terrain de jeu idéal pour vous prendre la vie ou pire encore vous enlever votre enfant . Seul , un homme capable de l'apprivoiser et de savoir interpréter les indices qu'elle donne peut prétendre sortir vainqueur de ce terrible bras de fer où le poursuivant peut être à son tour traqué .
L'enjeu de cette lutte pour la vie est un petit métis autiste qui ne sourit jamais et sa mère , une femme blanche au mutisme lié à des années de captivité . Les silences étant plus révélateurs du traumatisme et du déchirement psychologique qui assaillent l'enfant que de long discours . La bienveillance maladroite de Peck à leur égard n'a d'égale que sa dextérité pour les protéger . Mais Mulligan ne prend jamais position pour l'un ou l'autre camp , il contemple les hommes s'entretuer dans une nature indifférente à leur sort . Le chef apache est certes sanguinaire mais il ne fait que courir après les origines de son sang et sa lutte acharnée ressemble à une cause perdue d'avance . Alors que du côté de l'homme blanc on apprend à jouer au poker à l'enfant pour le socialiser . Déjà , la corruption de l'homme civilisé pointe son nez . On ne sait plus très bien d'ailleurs qui des deux combattants est L'HOMME SAUVAGE du film . La retraite de Sam Warner (Gregory Peck) paraît improbable à ses supérieurs de l'armée. Ses instincts d'éclaireurs sont innés . Ils ne demandent qu'à s'exprimer et en définitif il fait jeu égal avec son adversaire .
Original et classique , ce western inclassable nous hante longtemps après sa projection . Ces mêmes qualités que l'on retrouvera trois ans plus tard dans le plus unique encore CONVOI SAUVAGE de Richard C Sarafian . (Actuellement sur TCM , sortie DVD prévue le 18 Mars 09)            

 

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27 février 2009 5 27 /02 /février /2009 14:16

LA CHEVAUCHEE DE LA VENGEANCE (1959-RIDE LONESOME) Réal:Budd Boetticher , Scé.: Burt Kennedy , Ph.: Charles Lawton Jr , Mus: Heinz Roemheld , Prod.: Ranown Production/Columbia , Dist.: Action/Théâtre du Temple , Durée: 73 mn 
Avec: Randolph Scott , Karen Steele , Pernell Roberts , James Coburn , James Best , Lee Van Cleef  
  
Pas de mythologie de l'Ouest mais simplement des personnages auxquels on fait confiance . Un petit groupe d'hommes , une vieille cabane , de somptueux paysages et c'est tout . Dans ces contrées dangereuses l'homme est contraint de faire des choix . C'est de ces choix que naît l'action . Toujours le héros joué par Randolph Scott est dans le faux , aveuglé par sa vengeance alors que le méchant n'est jamais un « mécréant » sans foi ni loi . Après l'humaniste Usher (Richard Boone) dans THE TALL T, Sam Boone (Pernell Roberts) est carrément gentil et juste dans LA CHEVAUCHEE DE LA VENGEANCE.
Cette fois réalisateur et scénariste vont au bout de leur idée , nous privant du duel final tant attendu . Notre morale de spectateur petit bourgeois en prend un coup et nous laisse frustrer , le western nous ayant habitué à moins de subtilité . Loin des apparences et des stéréotypes les personnages qui sont sur le point de dégainer cachent derrière leur détermination leurs névroses et leurs désirs . Budd Boetticher nous prend à contre pied , en resserrant le cadre du western il simplifie à l'extrême tout en donnant aux rapports humains une richesse sophistiquée. Troubles et complexes , Ben Brigade (Randolph Scott) est du coté de la loi mais peut se comporter comme un lyncheur tandis que Sam Boone est prêt à tuer pour gagner son amnistie . Deux ennemis qui se jaugent , pas si différent que ça , qu'un code de l'honneur commun rapproche , avec des caractères où la psychologie se devine par un regard , un geste , un mot et où les intentions de chacun viennent contredire un ressenti positif .
Ce regard délicat sur ces rustres de cow-boys l'amène naturellement à dresser les plus beaux portraits féminins qui sont rares dans le western . La femme longtemps synonyme de pose dans l'action , ramenée à la scène obligée de roucoulade est ici habilement intégrée au scénario de Burt Kennedy . La dévouée Gail Russel dans SEPT HOMMES A ABATTRE , la frustrée Maureen O'Sullivan de L'HOMME DE L'ARIZONA composent des interprétations inoubliables . Karen Steele dans cette CHEVAUCHEE DE LA VENGEANCE est plus belle encore et suscite la convoitise de tous les hommes . La scène où elle peigne , à l'aube , sa magnifique chevelure dorée sous les regards libidineux de Sam et Wid (James Coburn) est troublante et sans équivoque . Sam qui s'adresse à Wid sait que « c'est un femme qui ne peut se passer d'homme » , il l'a « vu dans ses yeux » Puis s'adressant de nouveau à Wid complètement subjugué par cette vision : « j'ai dit dans les yeux ! » . Une femme, une vrai , sachant faire un bon café , de la bonne cuisine et sachant bien faire l'amour! Ce touchant tableau de gros machos qui se surprennent à rêver d'être l'homme de cette femme ne cache pas leur profond respect envers elle . Même les mescaleros veulent la posséder contre un cheval et sont prêts à combattre . Mise sur un piédestal , elle devient l'enjeu caché du film . Lors d'une conversation avec Sam , Ben , avoue avoir remarquer la beauté de cette femme qui ressemble étrangement à la sienne disparue . Même dans l'action , Karen Steele s'accroche et en impose . Dès sa première scène , elle sort du relais , armée , tire et capte l'attention des hommes . Puis lors de l'attaque des mescaleros , elle participe activement à la fusillade , n'hésitant pas à tuer pour protéger le groupe . Lorsque Ben Brigade s'est enfin vengé et qu'il la laisse partir avec Sam Boone , l'arbre aux pendus en feu symbolise sa haine et sa vengeance qui partent en fumée mais aussi son cœur incendié . Randolph Scott définitivement the poor lonesome cowboy laisse la fille la plus bandante du western lui échapper dans une fin positive des plus frustrante et mélancolique .
Budd Boetticher qui détestait les effets de style et les mouvements de caméra inutile s'impose pas moins avec ce film comme un esthète de l'image et du cadre , s'emparant du cinémascope avec une perfection de tous les instants . Les panoramiques sur les chevauchées qui semblent se dessiner sur le relief aride des paysages sont admirables de beauté . Alors que Ben et Sam chevauchent ensemble tout en discutant , des cavaliers au loin s'imposent tels des silhouettes annonçant l'action à venir .
Le cheval est au centre de l'action . Il est présent a côté des personnages . Il est utilisé avec une efficacité imparable dans la mise en scène , c'est par lui que Carrie (Karen Steele) comprend que son mari est mort . Et lorsque son cheval est blessé , Ben veille l'animal comme il s'occuperait d'un ami .
Voila simplement ce dont peut être constitué un chef d'œuvre: des chevaux , une femme et des hommes dans un western paradoxal dont le style épuré n'a d'égale que la richesse thématique . (Actuellement sur CineClassic)  

   

 

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18 février 2009 3 18 /02 /février /2009 13:51

A L'ANGLE DU MONDE (1937 - THE EDGE OF THE WORLD)
Réal.: Michael Powell , Scé.: Michael Powell , Ph.: Ernest Palmer , Skeets Kelly , Monty Berman , Mont.: Derek Twist , Mus.: Cyril Ray , Chœurs féminins de la chorale Orpheus de Glasgow , Prod.: Joe Rock , Durée: 81 mn .
Avec: John Laurie , Niall MacGinnis , Finlay Currie , Bell Chrystall , Eric Berry , Grant Sutherland .
                          
Un film , c'est une aventure . Imaginez un jeune réalisateur anglais avec une foi et une passion du cinéma inébranlable débarquant sur l'inhospitalière île de Foula dans l'archipel des shetlands . C'est au bout du monde qu'il pose ses caméras , entraînant avec lui des acteurs de théâtre loin des planches , au bord des falaises abruptes et magnifiques . Face à la rudesse des lieux , la chute semble plus probable que la réussite mais le jeune homme lasse des quota quickies (films anglais fauchés et routiniers) est venu se prouver qu'il peut regarder plus loin vers l'horizon .
Venez assister à la naissance d'un cinéaste qui se révèle au monde entier . Généreux et courageux tel un enfant casse-cou qui fait l'équilibriste , il part à la conquête de cette île vertigineuse . Il lui faut l'explorer , prendre les plus beaux paysages et les plus beaux cieux qu'elle peut lui offrir car si sauvage et dangereuse soit-elle , il sait qu'une île aime être visitée . Il s'imprègne de la population insulaire qu'il mélange aux acteurs et tel Robert Flaherty souffle un air d'authenticité sur les coutumes ancestrales et le mode de vie économique de l'île . De cette vie austère se dégage une incroyable chaleur humaine car Michael Powell nous convie non pas à un documentaire mais à un sublime poème romanesque . Comme ces chants religieux qui s'échappent de la petite chapelle et que le vent soufflant sur les herbes et les eaux draine jusqu'aux oreilles d'une vieille femme immobilisée . Comme la course sur la falaise où plane la mort sur ceux qui osent défier les éléments... La bouleversante scène de l'enterrement , les lettres jetées à la mer dans de petits bateaux de bois flottant d'un espoir fou jusqu'au père rejoignant son fils dans la mort , victime de ces falaises abruptes et du désespoir de ne pouvoir quitter son île .
 Avec le très beau mélo JE SAIS OU JE VAIS , Powell retrouvera cette même authenticité dans les rapports humains baignés de coutumes et légendes ancestrales écossaises . Plus tard encore lorsqu'il projettera de réaliser LE NARCISSE NOIR, ses collaborateurs s'empresseront de savoir dans quelle région il compte tourner cette intrigue qui met à l'épreuve des nonnes sur les hauteurs himalayennes . A la stupéfaction de tous, le tournage se fera en studio , pour ce qui deviendra le plus beau film technicolor du monde . D'un formidable pragmatisme , Powell avec l'enthousiasme d'un enfant qui défie les contraintes , se révèle être tout au long de sa carrière un technicien hors pair qui repousse les limites : un explorateur du cinéma . (Actuellement sur cine classic)  
  

 

 

 

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