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25 juin 2007 1 25 /06 /juin /2007 10:25

LE PASSAGE DU CANYON (1946-CANYON PASSAGE)
Réal.: Jacques Tourneur , Scé.: Ernest Pascal , d'après le roman de Ernest Haycocx , Ph.: Edward Cronjager (technicolor) , Mus.: Frank Skinner , Prod .: Walter Wanger , UNIVERSAL , 92 mn  
  

avec : Dana Andrews , Brian Donlevy , Susan Hayward , Hoagy Carmichael , Andy Devine , Ward Bond , Patricia Roc , Lloyd  bridges   

Il existe parfois des chefs-d'oeuvre dont on ne parle jamais car souvent invisibles . LE PASSAGE DU CANYON est de ceux-là . La sortie DVD actuelle nous permet de réparer cette immense injustice . Songez que ce western datant de 1946 n'est pas comme les autres et frappe encore de nos jours par son originalité .
Son scénario d'abord : pas de quête ni de mission à remplir mais au contraire un héros , certes instable et marginal qui se fond dans la collectivité des chercheurs d'or de Jacksonville . Le quotidien est décrit avec justesse et poésie . Poésie champêtre avec la construction de la cabane des jeunes mariés par toute la communauté . Et poésie de l'obscure où même le héros positif porte sa part d'ombre , où à tout moment la faillite peut l'accabler ou le colosse Bragg (Ward Bond fascinant de bestialité) lui tomber dessus! Les chercheurs d'or se battent à mains nues entre eux , violent ou tuent , avant de combattre les indiens qui ont manifestement le respect de l'auteur . La violence n'est pas un spectacle . Elle est toujours subie , jamais gratuite . Elle n'est jamais vraiment montrée , toujours dans l'ellipse . La mort est hors-champ . Elle est sans pitié et peut faucher un enfant tout comme le sympathique Andy Devine . Le spectateur et les personnages apprennent ce drame par les proches des victimes , ce qui décuple la soudaineté , partage le tragique et rend digne la douleur .
Plus remarquable encore est cette vision panthéiste de la nature . Dès le début les éléments naturels sont présents . La ville de Portland sous le déluge se transforme en champ de boue . Les paysages de l'Oregon époustouflants de couleurs technicolor se dessinent avec le vert des fougères , l'ocre et le vermillon des feuilles , la majesté des séquoias , l'argenté de l'eau des rivières et le feu des cabanes incendiées par la course sauvage des indiens . Sans oublier les ombres qui s'abattent sur cette luxuriance de la nature et de l'âme humaine . Cette beauté plastique du dedans et du dehors pleine de subtilité tempérée , on la doit au petit Jacques ! Fils de Maurice Tourneur qui a côtoyé les plus grands de la belle époque de Griffith à Chaplin . Mais le petit Jacques avec ses modestes séries B fantastiques sous l'égide de Val Lewton s'est imposé comme le maître de la suggestion et du non-dit . Eclipsant la carrière hautaine de son père grâce à son style unique . Sa force est d'être Français et d'apporter avec lui dans les films de genres américains sa sensibilité , ses doutes et sa relativité européenne . Ainsi dans le cadre de son premier western et premier film en couleur , la peinture de ce maître des clairs-obscurs s'illumine d'originalité et d'humilité . (DVD en VOSTF uniquement) 
  

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